Le 6 juin 2025 marque un tournant symbolique et potentiellement décisif dans les relations historiques entre la France et Haïti. L’Assemblée nationale française a adopté une résolution invitant le gouvernement à reconnaître l’injustice de la « double dette » imposée à Haïti en 1825, à en évaluer les conséquences, et à envisager un remboursement.
Cette résolution, bien que non contraignante juridiquement, représente un acte politique fort et un geste de lucidité historique. Elle s’inscrit dans un contexte de plus en plus sensible aux réparations post-coloniales et aux relations Nord-Sud.
Une dette illégitime qui a marqué l’histoire
En 1825, vingt-et-un ans après avoir arraché son indépendance à la France au prix d’une guerre sanglante, Haïti fut contrainte de payer une indemnité colossale aux anciens colons français pour “perte de biens”, incluant notamment les esclaves affranchis. Cette somme, initialement fixée à 150 millions de francs-or, fut une véritable rançon de l’indépendance. Pour pouvoir payer, Haïti dut contracter un emprunt auprès de banques françaises – d’où l’expression de « double dette » : une indemnité injuste doublée d’une dette contractée pour la payer.
Ce poids économique a hypothéqué le développement du jeune État haïtien pendant plus d’un siècle, appauvrissant durablement la nation.
Un débat relancé à l’Assemblée française
La résolution votée par l’Assemblée nationale française appelle donc le gouvernement à franchir un cap : reconnaître officiellement cette injustice, évaluer son impact historique et économique sur Haïti, et étudier la possibilité d’une compensation ou d’un remboursement.
Cette démarche est saluée par plusieurs historiens, économistes et défenseurs des droits humains, qui y voient un premier pas vers la réparation d’une dette morale et politique que la France a envers Haïti.
Une avancée symbolique… mais attendue sur le terrain
Pour les défenseurs de la cause haïtienne, cette reconnaissance est un signal encourageant, mais il reste à voir si le gouvernement français traduira cette résolution en actes concrets. Car, pour beaucoup, le remboursement ou une forme d’indemnisation reste une exigence de justice historique.
Du côté d’Haïti et de sa diaspora, la nouvelle suscite à la fois espoir et prudence. Nombreux sont ceux qui voient dans ce geste un début de réparation, une reconnaissance de la douleur collective infligée par l’histoire coloniale.
La résolution du 6 juin 2025 n’efface pas le passé, mais elle pourrait contribuer à réécrire l’avenir. Elle ouvre la porte à une nouvelle dynamique entre Haïti et la France, fondée sur la mémoire, la vérité, la justice – et peut-être, demain, sur des réparations concrètes.